Un sportif de plus de 30 ans est-il foutu ?

Christophe FRANCK - 2018-08-22

Je suis assez étonné d’entendre parler de sportifs « âgés » lorsqu’ils ont dépassé 30 ans. J’entends que c’est exceptionnel pour le footballeur Cristiano Ronaldo d’être aussi performant et athlétique alors qu’il a 33 ans. Chez les sportifs amateurs, on pousse la limite de péremption un peu plus loin : disons 40 ans. Au-delà, hormis dans la pratique des sports d’endurance longue et peu intense, il semble déraisonnable de vouloir encore performer. Alors d’accord ou pas d’accord ?

D’abord, vieillissons moins vite !

La jeunesse éternelle n’existe pas. Certains, comme Faust, ont essayé de la conserver mais ils y ont perdu leur âme. Bref, on vieillit et c’est ainsi.  Mais tout le monde ne vieillit pas de la même façon ni à la même vitesse. Et là, sauf cause de maladies hormonales, nerveuses, cellulaires, etc., on est responsable de notre capital jeunesse. Il n’y a pas de grands secrets : une bonne hygiène de vie et un esprit ouvert. Une alimentation saine, de l’activité physique régulière et l’envie de rester « jeune dans sa tête ».  Ces bonnes pratiques se mesurent au plus profond des cellules, sur les télomères. « Ils constituent l'extrémité chromosomique qui ne peut être entièrement dupliquée par l'enzyme chargée de cette fonction. Ceci explique pourquoi peu à peu, ceux-ci ont tendance à se raccourcir avec le temps. Sauf si l’on mène une vie saine. » © Samulili, Wikipédia, cc by sa 3.0. Evidemment, manger sainement et se bouger sur le plan physique ne constituent pas la fontaine de jouvence. Les cellules s’altèrent quand même, mais bien moins vite.

Ensuite, attendons la concurrence du terrain

Pour recentrer l’article sur les performances sportives en compétition, il semble évidemment que c’est la concurrence qui élimine « les moins performants ». Et pour être performant à très haut niveau, il faut non seulement avoir des qualités naturelles mais également s’entrainer intensément. Cela nécessite de faire des choix de vie centrés autour de son propre corps pour en faire un outil affûté et performant. Ces sacrifices usent le corps et érodent l’envie de poursuivre l’aventure qui se fait au détriment des vies familiale, sociale et professionnelle. Ce n’est donc pas forcément le manque de qualités physiques qui entraine l’arrêt de la carrière sportive. Certaines et certains athlètes ont poursuivi ou continuent leur carrière en étant performants : Dana Torres, nageuse américaine, médaillée olympique en 1984 à 17 ans, a été sélectionnée à 41 ans pour les JO de Pékin en 2008. L’âge où Laura Flessel-Colovic, actuelle ministre des sports, a stoppé sa brillante carrière d’escrimeuse. Le gardien de but italien Gianluigi Buffon, transféré de la Juventus de Turin au Paris Saint-Germain, est toujours un top joueur à 40 ans. C’est à cet âge que le handballeur Jérôme Fernandez, meilleur buteur de l’histoire de l’équipe de France, a pris sa retraite. Il avait été capitaine de l’équipe nationale jusqu’à 38 ans. Ce ne sont pas des cas uniques ; d’autres athlètes de disciplines moins médiatisées sont toujours performants, comme Christelle Micallef en Savate boxe française qui a décroché le titre de vice-championne de France Assaut en 2017 et 2019 à 47 ans !

Et à chacun sa performance ; tout le monde ne cherche pas à faire de la compétition. Pour certaines et certains, la pratique d’une activité intense est un mode de vie pour garder un corps performant et esthétique. Et repousser les années… de quelques années.

Quantité versus qualité ? Pas si simple pour durer

On oppose souvent la quantité et la qualité dans la manière de s’entrainer lorsqu’un athlète prend de l’âge. Un peu comme s’il pouvait moins s’entrainer parce qu’il se connait mieux. Je crois que ce n’est pas comme cela qu’il faut prendre le problème. En se connaissant mieux, une sportive ou un sportif va et doit élaguer tout ce qui est inutile à la performance, s’entourer des bonnes personnes dans les domaines de la préparation physique et être très (très) pointilleu(se)x sur son hygiène de vie. L’alimentation, la récupération, le sommeil, les soins…, ne sont plus - du tout - des options de performance mais des obligations. D’ailleurs, il ne faut pas se faire d’illusion, celles et ceux qui durent ont toujours eu une vie saine.

Des faiblesses accompagnent la prise d’années : la qualité des tissus est moins bonne, augmentant ainsi le risque de blessures et diminuant le processus de cicatrisation. Sur le plan cardiorespiratoire, les capacités diminuent lentement (5% / 10 ans) à partir de 30-35 ans alors que la puissance musculaire reste sensiblement identique jusqu’à 45-50 ans (Dr Roland Krzentowski, médecin du sport).

Donc, c’est comment qu’on fait pour rester au top ?

Pour continuer à être performant, il faut donc continuer à s’entrainer de façon optimale. Mais en évitant au maximum les blessures qui risquent de plomber définitivement la carrière. Il est donc indispensable de bien planifier ses sessions d’entrainement, et comme je l’ai dit précédemment en étant strict sur tout ce qui favorise la préparation à l’effort et la récupération.  Certaines disciplines se prêtent peut-être plus à une possible longue carrière. Comme les sports collectifs par exemple, où les facteurs de performance sont nombreux : technique, tactique, physique et mental. Pour Jérôme Fernandez, « l’expérience et le savoir-faire tactique viennent compenser l’aspect physique. Quand on a plus d’expérience, on réalise les efforts au bon moment, on peut être explosif et efficace ». Idem pour les activités de duels (escrime, boxe française, judo, etc.).

Pour celles et ceux qui ne visent pas le plus haut niveau mais souhaitent néanmoins être performant(e)s, la voie à suivre est la suivante : éviter les périodes sans entrainement, équilibrer judicieusement les séances à faible et haute intensité et être optimiste : on peut toujours progresser quelque part !